Un été indien

Fait inédit dans l’histoire de Bolivie


A la une des journaux et ce depuis un mois, un sujet fait particulièrement polémique : l’annonce par Evo Morales, président de Bolivie du versement obligatoire d’un double « aguinaldo ». Un aguinaldo est un 13ème mois versé à tous les salariés du secteur privé et public et correspond donc à un 14ème mois.

Cette mesure, à la fois qualifiée comme exemplaire pour le reste du monde est aussi jugée profondément inéquitable.

Allégresse des salariés, mécontentement des chefs d’entreprises, scepticisme de la part des opposants, les réactions sont vives surtout pour les 75% d’actifs non-salariés (agriculteurs, commerçants ambulants, artisans…) qui restent sur leur fin -la masse salariale représentant environ 25% de la pop active. Si les travailleurs ne cachent pas leur satisfaction, ils ne sont pas forcément à l’aise avec cette nouvelle loi, dans la mesure où un quart de la population vit sous le seuil de pauvreté. (source : http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/bolivie/presentation-de-la-bolivie/).

Tatiana par exemple, mère de famille et institutrice à l’école met en avant ce contraste. Pour elle et sa famille, ce complément de salaire vient soulager la perte de revenus de son mari Raul qui a vu fuir ses 30 colonies d’abeilles suite à la rudesse de l’hiver. Pour eux, le double aguinaldo ne viendra pas soutenir un surplus de consommation pour les fêtes de fin d’année. Car la principale crainte relatée par les opposants est celle de l’inflation provoquée justement par les salariés qui toucheront plus et ayant pour conséquence de creuser un peu plus les écarts de niveau de vie entre la population. Tatiana disait en effet que cette mesure ne lui paraissait pas juste dans le sens où elle se sentait déjà privilégiée de bénéficier d’un salaire tous les mois tandis que d’autres travaillent plus de 12h par jour sans aucune rétribution fixe.

Morales, quand à lui tient ses promesses de campagne et suit ses lignes directrices. Son premier plan a été celui de la nationalisation des hydrocarbures, des télécommunications et des ressources minières, auparavant détenus par des multinationales. (http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2013/02/18/la-bolivie-nationalise-une-troisieme-entreprise-espagnole_1834679_3222.html).
D’autre part, il a fait établir dans la constitution l’obligation de redistribuer les excédents résultant de la production en prenant comme base l’être humain et le travail (art 5). Ainsi, lorsque la croissance augmente annuellement d’au moins 4,5%, un double aguinaldo est versé à ceux qui contribuent  à l’augmentation de la richesse nationale. Morales affirme là un choix politique fort. Il parle de « socialiser la richesse », et préfère voir gonfler les poches des travailleurs plutôt que celles des patrons et actionnaires. Avec cette mesure, il se positionne contre le néo-libéralisme qui selon lui paupérise les travailleurs -en les précarisant sur le marché de l’emploi- et freine les avancées sociales.

Bien sûr, la suite de son programme incluant des réformes sociales pour tous les autres est attendue, d’autant qu’il a annoncé le renouvellement de sa candidature pour les élections en 2014. Mais comme dirait Marx : « Cada paso de movimiento real vale mas que una docena de programas » ( chaque pas en avant d’un réel mouvement vaut mieux qu’une douzaine de programmes.à

Source : El aguinaldo en tiempos de Evo, Idon Moises Chivi Vargas, La Epoca, del 24 al 30 de noviembre de 2013

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Cette entrée a été publiée le 18 décembre 2013 à 20 h 20 min et est classée dans Bolivie. Bookmarquez ce permalien. Suivre les commentaires de cet article par RSS.

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